Produire des arachides au Canada
Un plant d'arachides
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Dans le sud de l'Ontario, on cultive des arachides depuis plus de 40 ans. Ernie et Nancy Racz ont été parmi les pionniers de cette production originale.
Le comté de Norfolk faisait partie, jusque dans les années 90, de ce qu’on appelait la « ceinture du tabac ». Les terres, sablonneuses, se prêtaient bien à cette culture que le gouvernement provincial et les entreprises encadraient.
Mais avec le déclin du tabac, beaucoup d’agriculteurs se sont lancés dans d’autres productions, comme l’arachide. Cette plante tropicale, qu’on récolte en l’arrachant, était bien adaptée elle aussi aux terres et au climat chaud du comté. Plusieurs s’y sont essayés. Il y a déjà même eu en Ontario une coopérative de producteurs d’arachides avec 28 membres.
Des plants d'arachide
Photo : Radio-Canada
Mais la concurrence des producteurs américains était trop forte, et les coûts de production, trop élevés.
Aujourd’hui, ils ne sont plus que deux qui réussissent à survivre grâce à la vente au détail et à la transformation artisanale : Picard’s Peanuts et Kernal Peanuts.
Cette dernière appartient à Ernie et Nancy Racz. Ils ont participé très activement au développement de la production et au fonctionnement de la coopérative.
Ernie et Nancy Racz devant la boutique de leur entreprise, Kernal Peanuts, à Vittoria, en Ontario.
Photo : Radio-Canada
Les obstacles n’ont pas manqué! Il leur a fallu tout apprendre à la dure.
Ils ont même dû inventer une nouvelle méthode de récolte. Celle employée aux États-Unis ne convenait pas au climat ontarien : on y laisse les plants sécher au sol après l’arrachage. De ce côté-ci de la frontière, cette méthode provoque des pertes, par le gel et la pluie, allant jusqu’à 37 % des gousses.
Heureusement, un chercheur ontarien, Peter White, a conçu une machine qui sépare l’arachide du plant directement au champ. C’est une machine semblable qu’Ernie et Nancy Racz utilisent aujourd’hui. Mais ils doivent encore l’adapter 40 ans plus tard! En 2018, il a fallu d’urgence ajouter un disque à l’avant pour couper les tiges. L’été ayant été chaud, les plants ont trop poussé et se sont entremêlés. La machine ne parvenait pas à les arracher.
La machine qui sert à récolter les arachides
Photo : Radio-Canada
Le deuxième défi a été le séchage : les arachides fraîchement récoltées contiennent 60 % d’eau et sont recouvertes de beaucoup de terre. Il a fallu d’abord inventer une machine pour les laver, puis adapter les séchoirs à tabac. Sécher les arachides prend huit jours. Il faut faire sécher rapidement l’écale puis doucement la graine à l’intérieur. Trop vite, elles goûtent le brûlé. Trop lentement, elles moisissent. Les Racz ont appris par essais et erreurs, en gaspillant quelques récoltes.
Les graines d'arachide sont séparées de leur gousse et recueillies dans de grands bacs.
Photo : Radio-Canada
Ils décortiquent leurs arachides au fur et à mesure de la vente, pour offrir un produit frais. Elles sont transformées de plusieurs manières, la plupart cuites dans l’huile d’arachide, bien sûr, mais qui ne vient pas de la ferme.
D'ailleurs, l'huile usée sert à faire fonctionner les tracteurs. Les écales sont aussi brûlées pour chauffer tous les bâtiments.
Aujourd’hui, les Racz ont l’âge de la retraite. Ils n’ont pas de relève et cherchent un acheteur qui voudrait continuer l’aventure des arachides ontariennes.
La boutique de Kernal Peanuts
Photo : Radio-Canada
L’arachide est une plante très originale : ce qu’on arrache du sol est un fruit, pas une racine. L’arachide est une légumineuse (fabacées) comme le pois ou le soya. Ses fruits sont semblables (des gousses contenant quelques graines). Sauf qu’une fois la fleur fécondée, la « branche » qui la retient au plant s’allonge vers le sol. Le fruit ne se forme qu’une fois bien enfoncé dans la terre. L’écale grossit alors et durcit avant que l’embryon ne se développe. À la récolte, les arachides immatures sont donc semblables aux autres, mais plus légères, ce qui permet de les séparer.
Le reportage d’Aubert Tremblay et Michel Poirier a été diffusé à La semaine verte, à ICI Radio-Canada Télé.